Jacques Higelin

Publié le par Betty

Jacques Higelin, Troubadour des grands chemins

Jacques Joseph Victor Higelin
18 octobre 1940 Brou sous Chantereine (77)

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Pour qui "connaît" Higelin et aime ses sautes d'humeur, chacun de ses délires excentriques, chacune de ses apparitions clownesques, restent un moment extraordinaire de poèsie, de rêve et de rire. Personnage atypique avant tout, sans concession à la mode du show-biz, Higelin dérange parfois. S'il en fait souvent trop, c'est pour qu'on l'écoute et le remarque parcequ'il sait sans doute qu'il faut hurler pour se faire entendre, botter le cul aux bonnes manières et aux bien-pensants.higelin-couv.jpg

Jacques Joseph Victor Higelin naît dans la nuit du 17 au 18 octobre 1940 (vers 00 h 20) à Brou sous Chantereine dans la Seine et Marne, à l'est de Paris. C'est la guerre, et sa ville n'est pas épargnée par les bombardements. Avec Paul, son frère, et leur père cheminot et musicien, les deux enfants Higelin découvrent le piano et les grands poètes d'alors : Trénet et Maurice Chevalier. Passe la guerre, Jacques grandit, en musique et en chanson, et son père l'incite à chanter dans les cinémas, lors des entractes, et dans les radios crochets. Ce goût (et ce talent) prononcé pour le music hall le pousse à quitter l'école à 14 ans pour se lancer dans le spectacle. Comédies musicales (Nouvelle orléans avec Sidney Bechet), petits rôles au cinéma, cours de comédie, lui laissent cependant le temps d'apprendre la guitare, le piano, et la clarinette.

En 1961, c'est la guerre d'Algérie à laquelle Jacques n'échappe pas. Il part en Allemagne, puis en Algérie pendant six mois où il rencontre Areski Belkacem et où il écrira ses Lettres d'un soldat de vingt ans. A son retour en 1963, Higelin n'a rien perdu de son art, et se diversifie dans le théâtre expérimental, le café théâtre et la chanson. On le retrouve ainsi aux Trois Baudets avec Moustaki pour chanter du Boris Vian. C'est au café théâtre qu'en 1964 il travaille avec Rufus et Brigitte Fontaine, avec laquelle il se lie d'une amitié profonde.

C'est encore Jacques Canetti qui donne sa chance aux jeunes artistes en leur faisant enregistrer deux albums en 1965.

Vient mai 1968. Higelin continue son combat libertaire et se fait remarquer par les étudiants qui le prennent un peu pour mascotte.Il retrouve son ami Areski avec lequel il enregistre en 1969 (Brigitte Fontaine participe à ce magnifique trio) chez Saravah. Le théâtre, la composition, la politique, la poèsie, forment chez Higelin un ensemble délirant et explosif qu'il utilise tant dans ses chansons que sur scène, où il montre sa joie de vivre, sa rage de vaincre, et son amour du public. Crabouif, sorti en 1971, est son premier album solo. Il quitte un peu Paris tout en continuant la scène et le cinéma. Sa vie de famille le comble : après Arthur (Arthur H) né en 1967, Kuelan donne naissance à Ken en 1975.

De retour à la capitale, plus en verve que jamais, Jacques sort BBH 75. Les disques s'enchaînent et Jacques prend soin de se préserver de la vie parisienne et branchée du "Chaud chaud Biz". Il s'installe en banlieue, et petit à petit, son succès va grandissant (Grand Prix Charles Cros en 1976). Il est un artiste reconnu mais qui ne cède pas à la mode et sait se démarquer de la mouvance rock de l'époque. Ses concerts sont de véritables rencontres avec le public, parfois pendant quatre ou cinq heures, pendant lesquelles Higelin bouscule les habitudes scéniques.
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En 1979, la double sortie de Champagne... et Caviar... représente un sommet dans la carrière de Jacques. Il enchaîne les
tubes, les concerts, les tournées, et on ne parle que de ce poète farfelu et magnifique qui hante la scène française. Ses spectacles sont des grands moments de mise en scène, de Paris au Zaïre, en passant par Montréal. Mais à la suite de son album Aï en 1985, Higelin fait un bide. Il préfère se retirer un peu, compose, écrit (ou rassemble plutôt) Lettres d'un soldat... qui paraît en 1987, prend du recul. C'est Tombé du ciel qui sort Higelin de ce petit passage à vide, et devant le succès énorme de cet album en 1988 (disque de platine), Jacques entame une nouvelle tournée dans toute la France, avec Brigitte Fontaine et son fils Arthur.
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Le 24 septembre 1990, Izia, son troisième enfant apparaît. A 50 ans, avec sa femme Aziza, Higelin renaît. Après le superbe Illicite, ses créations se font plus matures (Aux héros de la voltige 1994 ou Paradis païen en 1997). Toujours en mouvement, Higelin ne cesse de tourner et d'écrire. En cette fin de siècle, on le trouve au USA, en Afrique, en Asie, au Moyen-Orient,...et en France, pour une tournée minimaliste avec son complice-percussioniste Mahut (trois heures de délire, Jacques et son piano, sa guitare, son accordéon,...). 
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En 2004, ils entament ensemble une longue tournée consacrée à Trenet, reprenant les plus grands succès du Fou chantant. Le spectacle, intitulé "Higelin enchante Trenet", se prolonge jusqu'au printemps 2005 et donne enfin l'occasion à l'autre fou chantant de revenir sur le devant de la scène. Un album issu de ce spectacle sort le 12 septembre 2005. Il enchaîne à nouveau les émissions télé (Ruquier, Fogiel, Journaux télévisés,...) et radio. Malgré sa difficulté à conserver la confiance de ses maisons de disques (Higelin fait partie des Grands de la chanson qui se font "virer" de leur maison de disques pour délit de non-conformisme, comme Chamfort, Fontaine ou Chédid), Higelin sort en 2005 une nouvelle compil "Entre deux gares." Poète et globe-trotter, Jacques Higelin, à presque 67 ans, continue à nous faire vibrer et à porter la "bonne parole" à travers le monde.
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Nous l'attendons ce soir au Théâtre Edwige Feuillère à Vesoul.

Voici la retranscription d' un article-entrevue paru le 18 novembre 2006 sur www.orange.fr (CopyrightAFP) à l'occasion de la sortie d'Amor doloroso.

L'attente a été longue mais pas vaine: huit ans après son dernier album de chansons originales, "Paradis païen", Jacques Higelin sort "Amor doloroso", disque remarquable dans lequel il célèbre l'amour avec une fougue adolescente retrouvée.
"Je n'avais pas fait d'album depuis longtemps et je n'étais pas emballé par les trois derniers. C'était le syndrome de l'échec: j'avais peur de me planter et de planter les gens qui voulaient m'aider", explique Jacques Higelin à l'AFP. "Je me suis donc
dit: cet album sera le premier d'une nouvelle aventure, ou le dernier et je ne reviens plus jamais en studio". La première hypothèse était la bonne. A 66 ans, Higelin signe son meilleur album depuis "Tombé du ciel" (1988), en 11 chansons inspirées, variées et dédiées à l'amour, dont "Queue de paon", exercice de style coquin, "Ice dream", aux accents gainsbourgiens, la fantaisie macabre "Halloween", "Crocod'ail", au groove nonchalant, ou la sublime "Amor doloroso".
"En faisant l'album, j'avais l'impression d'être plus jeune, comme un débutant", glisse l'artiste, échevelé comme un ado et fantasque comme personne. La gestation du disque a pris du temps. Higelin, poète autant que chanteur, croulait sous les chansons écrites au fil des ans: "J'avais une vingtaine de classeurs, des feuilles qui traînaient partout, c'était un vrai bordel".
Pour s'aérer, il a consacré un spectacle aux chansons de Charles Trenet entre 2004 et 2005. Début 2005, il fait une rencontre déterminante, celle de Rodolphe Burger, ex-leader de Kat Onoma. Burger lui propose de participer au festival
"C'est dans la vallée", qu'il organise fin mai 2005 dans son village alsacien de Sainte-Marie-Aux-Mines.
Les deux hommes deviennent amis et Higelin décide de confier la production d'"Amor doloroso" à Burger, après avoir d'abord envisagé de travailler à Londres avec Dimitri Tikovoi, collaborateur de Placebo. "Rodolphe a été formidable, porteur", souligne Higelin. "Il m'a dit: " Cet album, je veux que ce soit toi à ton meilleur, dans ta liberté de création, et je ferai tout pour ça".
Le disque a été enregistré à la ferme-studio de Burger, à Sainte-Marie-Aux-Mines, dans les montagnes des Vosges, avec neuf musiciens, dont le fidèle percussionniste de Higelin, Dominique Mahut. Lui et Burger ont su canaliser la folie douce du chanteur: "Ils ont été merveilleux, comprenant parfaitement ma nature caractérielle et cyclothymique". Cet environnement humain autant que géographique a été déterminant. "J'étais loin de Paris, des studios, de tout ce merdier et j'ai fini par oublier toute pression", assure-t-il en louant inlassablement la "profonde gentillesse" des gens du village et de ses musiciens.
"On se croyait dans un village d'enfants, plein de petites maisons roses, j'avais l'impression d'être un schtroumpf", se rappelle Higelin en imitant l'accent alsacien, région d'origine de son père. Même s'il n'a jamais arrêté la scène -il débutera une nouvelle tournée en janvier, les huit ans qui séparent ses deux derniers albums ont suscité attentes et interrogations chez son public.
"Comme ils te voient pas à la télé, les gens croient que tu as disparu", sourit-il. "L'autre soir, une fille est venue me parler très gentiment en me disant: "J'aimais bien ce que vous faisiez". J'étais pas rasé, je fumais, j'avais peut-être l'air d'être devenu un clochard. Ca m'a fait rire".

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Publié dans Les artistes

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